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Réforme du 31 juillet 2014 : l’encadrement de la liberté de l’expert dans la détermination du prix lors d’une cession de droits sociaux

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Publié le 11/07/2016
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Cession de parts ou de droit sociaux : La réforme

La cession de parts ou de droits sociaux est soumis au régime de la vente. Ainsi, les éléments essentiels de ces cessions, à savoir la chose et le prix, répondent à des conditions précises

La part sociale ou l’action

En effet, la chose, c’est-à-dire la part sociale ou l’action, doit exister. Ce n’est pas forcément le cas lors d’une acquisition de titres d’une société fictive ou encore lors de l’acquisition d’une société dissoute. Concernant cette dernière hypothèse, la Cour de Cassation considère que la cession de titres d’une société dissoute après une fusion absorption est nulle car la chose a disparue.  

Détermination du prix

Le prix doit être réel, sérieux et déterminé ou déterminable. L’exigence de la détermination du prix vient du droit commun de la vente. Cependant, il est courant que le prix ne soit pas chiffré au jour où est conclu le contrat, car il n’est pas forcement possible d’évaluer le montant des parts acquises. A cet effet, le droit français s’est pourvu d’outils visant à apporter un certain pragmatisme au principe de la détermination du prix, notamment via les clauses « earn out », permettant au prix d’être seulement déterminable. Une deuxième option existe, celle de laisser la détermination du prix à un tiers. 

La détermination du prix par un tiers est permise par les articles 1592 et 1843-4 du Code Civil qui permet de confier à un tiers, précisément à un « expert » le soin de déterminer la valeur des droits cédés. 

Cependant, ce dernier a subi une réforme par l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, entrée en vigueur le 3 août 2014, afin de pallier deux imprécisions inhérentes à son application.

  • La première imprécision concerne son champ d’application. La question s’est posée de savoir s’il était uniquement applicable dans l’hypothèse de cession des parts et actions obligatoire en vertu de la loi ou des statuts, ou alors, à des cessions conclues entre associés, hypothèse étendue par la jurisprudence. 
  • La deuxième imprécision concerne les pouvoirs de l’expert. Est-ce que le juge ou encore les statuts pouvaient imposer à l’expert une méthode d’évaluation ou alors était-il libre d’évaluer la valeur des parts sociales comme il l’entendait ?

De première intention, l’article 1843-4 du code civil devait régir la détermination du prix dans les hypothèses de cessions forcées de parts sociales ou d’actions lors d’une contestation. Ainsi, le texte a été élargi, de manière similaire à son champ d’application, aux cessions prévues par les statuts, à condition que la valeur des titres ne soit ni déterminée, ni déterminable. En pratique, si les statuts permettent de déterminer le prix ou s’il n’y a pas de contestation, le recours à l’expert n’est pas obligatoire.

Les pouvoirs de l’expert

Mais la plus grosse innovation apportée par la réforme concerne l’étendue des pouvoirs de l’expert. A ce propos, antérieurement à 2014, ce dernier déterminait le prix de cession des droits sociaux selon la méthode qu’il jugeait judicieuse. Mais, depuis la réforme, l’expert se trouve désormais contraint de suivre et de respecter toute méthode de détermination du prix des droits sociaux, prévue par les statuts ou toute autre convention liant les parties lorsque l’article 1843-4 s’applique dans l’un des cas légaux visés au I dudit article.

Concrètement, si les associés n’ont donné aucune indication, l’expert a la plus grande liberté pour évaluer les titres et l’expertise s’impose aux parties. Dans le cas contraire, l’expert est lié, il sera tenu par les méthodes d’évaluation déterminées par les associés. 

En outre, le caractère d’ordre public attaché à l’article 1843-4 du Code civil ne semble pas remis en cause par la réforme.

Enfin, il est à noter que la réécriture de l’article 1843-4 invite à envisager autrement le cas où les associés voudraient échapper à l’obligation que revêt l’expertise. En effet, sauf erreur grossière, l’avis de l’expert s’impose aux parties, dépourvues de recours. Jusqu’à présent, l’existence d’une telle erreur était rarement admise par les tribunaux. Dans la mesure où l’expert est désormais légalement tenu d’appliquer les clauses de détermination du prix, il est possible de penser qu’il commettrait une erreur grossière en procédant à l’évaluation selon d’autres modalités, ce qui n’était pas le cas jusqu’alors.

Cette évolution tend à renforcer le principe de la liberté contractuelle en limitant les pouvoirs du tiers expert et de redonner du poids aux conventions conclues entre les parties. 

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