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Les sanctions disciplinaires en droit social : le délai de prescription des faits fautifs n’est pas interrompu en cas de simple enquête préliminaire

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Publié le 04/25/2017
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En droit social, les pouvoirs disciplinaires de l’employeur sont très encadrés. En effet, les sanctions disciplinaires prononcées par l’employeur à l’encontre du salarié sont encadrées par le Code du travail, qui ne laisse pas beaucoup de place à l’interprétation.

 

Il ressort de l’article L.1331-1 du Code du travail que la sanction disciplinaire est une mesure, autre qu’une observation verbale, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière et sa rémunération.

 

La sanction la plus importante reste le licenciement, qui, lorsqu’il a un caractère disciplinaire, est soumis à peu de choses près à la même procédure que les autres sanctions et donc aux mêmes délais.

 

Évidemment, pour que le salarié soit sanctionné, il faut qu’il ait commis une faute. Il n’y a pas vraiment de définition de la faute au sein du Code de travail, l’article 1331-1 évoquant simplement un « agissement du salarié considéré comme fautif ». A la lecture de l’article 1332-4, il est juste énoncé que l’employeur ne peut pas sanctionner des faits fautifs commis par le salarié plus de deux mois après leur commission ou plus de deux mois, après que ces faits aient été portés à sa connaissance à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.

 

L’articulation entre le droit du travail et le droit pénal est parfois délicate. En effet, à la lecture de cet article, l’on serait tenté de croire que dès lors que le fait commis par le salarié entraine l’application du droit pénal, peu importe la procédure, le délai de deux mois pour sanctionner le salarié est suspendu dans l’attente d’une éventuelle condamnation.

 

Or, il n’en est rien. Il ressort d’un arrêt rendu par la Chambre sociale le 13 octobre 2016 que « L’ouverture d’une enquête préliminaire, qui n’a pas pour effet de mettre en mouvement l’action publique, n’est pas un acte interruptif de prescription des sanctions disciplinaires prévu à l’article L.1332-4 du Code du travail ».

En l’espèce, un salarié engagé en tant que conducteur de bus commet des violences contre une passagère. L’employeur prend connaissance des faits le 16 janvier 2009. En théorie, il avait donc jusqu’au 16 mars pour enclencher la procédure disciplinaire. Or il décide d’attendre et convoque le salarié à un entretien préalable seulement le 25 octobre 2010. Pour se défendre, il invoque le fait que le délai de 2 mois pour engager la procédure est interrompu en cas de poursuites pénales et que cette notion inclus nécessairement l’enquête préliminaire.

 

Or la Cour de cassation écarte ce raisonnement pourtant logique qui semble témoigner de la bonne foi de l’employeur, qui aurait très bien pu déclencher immédiatement la procédure disciplinaire.

 

Ainsi, il faudra bien distinguer l’enquête préliminaire de la mise en mouvement de l’action publique. D’une part, cela semble logique car l’enquête préliminaire par définition est antérieure aux poursuites pénales. D’autre part, cette solution semble critiquable, car si l’employeur avait licencié le salarié durant l’enquête préliminaire, et que quelque temps plus tard cette dernière aurait conclu que l’agression n’a pas eu lieu, on ne sait pas quel aurait été le raisonnement du juge Prud’homal : réintégration ? licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

 

Ainsi, des questions se posent encore quant à l’articulation entre le droit social et les poursuites pénales…

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