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Le dirigeant et sa société : attention aux risques de confusion.

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Publié le 08/31/2017
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Droit des entreprises en difficulté : Faillite personnelle 

L’idée parait acquise aux yeux de tout professionnel du droit, mais en réalité pour beaucoup de dirigeants, la frontière entre leur patrimoine personnel et celui de la société semble poreuse.

« C’est ma société et je n’aurais pas le droit de disposer de ses biens comme des miens propre ? ».

Eh bien… La réponse ne peut être que négative, n’est-ce pas Monsieur Géronimi ?

Interdiction de gérer toute entreprise commerciale

L’interdiction de gérer toute entreprise commerciale, qui sonne comme l’une des interdictions les plus contraignantes pouvant être prononcée contre un dirigeant de société, vient en effet de frapper le président du Sporting Club de Bastia, Monsieur Pierre-Marie Géronimi, pour des faits relatifs à la liquidation judiciaire d’une autre société lui appartenant.

Effectivement le Tribunal de Commerce de Bastia vient de prononcer une sanction à l’encontre de ce dernier, en application de l’article L. 653-2 du code de commerce venant énoncer que :

« La faillite personnelle emporte interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise ayant toute autre activité indépendante et toute personne morale ».

Si pour Monsieur Géronimi, il parait vraisemblablement trop tard de lui conseiller de nous lire, cette sanction récente est un bon prétexte pour nous, avocats en droit des entreprises en difficulté à Aix-en-Provence, de vous conseiller et vous énoncer les faits et gestes à éviter.

Qui est concerné ?

La faillite personnelle est une sanction d’ordre professionnelle, prononcée postérieurement ou parallèlement à une procédure de liquidation judiciaire ou de redressement judicaire et qui est susceptible de frapper une liste limitative de personnes énoncée à l’article L. 653-1 du code de commerce.

Sont alors concernées :

  • Les personnes physiques exerçant une activité commerciale, artisanale ou agricole et toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante.
  • Les personnes physiques, dirigeants de droit de personnes morales. Sont ici visés les gérants, administrateurs, directeurs généraux…
  • Les personnes physiques, dirigeants de fait de personnes morales. Nous nous devons de rappeler qu’un dirigeant de fait désigne la personne qui, bien que n’ayant pas été officiellement désignée en tant que dirigeant, s’est comportée comme tel et a réellement commis les faits reprochés.
  • Les personnes physiques représentants permanents de personnes morales.

Pourquoi cette sanction ?

Il est important de vous préciser que la faillite personnelle est une sanction individuelle venant condamner des fautes commises par le dirigeant malhonnête ou gravement incompétent dans l’exercice de ses fonctions.

Le prononcé de cette sanction est donc indépendant du sort de la société en procédure collective et n’est lié qu’aux actes de gestion du dirigeant. De plus, le prononcé de cette sanction n’est pas de plein droit.

Cette sanction peut donc tout d’abord être prononcée par le tribunal de commerce, en vertu de l’article L. 653-4 du code de commerce, contre tout dirigeant de droit ou de fait d’une personne morale lorsque est relevé un des faits suivants :

  • Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres.
  • Avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel sous la protection de la personne morale masquant ses agissements.
  • Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l’intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement.
  • Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements de la personne morale.
  • Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale.

Cette sanction peut également être prononcée par le Tribunal de Commerce, en vertu des articles L. 653-3 et L. 653-5 du code de commerce, à la fois aux dirigeants de personnes morales et aux entrepreneurs personnels, lorsque est relevé un des faits suivants :

  • Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de son actif ou frauduleusement augmenté son passif.
  • Avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction et d’administration d’une personne morale contrairement à une interdiction posée par la loi.
  • Avoir maintenu artificiellement une entreprise défaillante dans l’intention de retarder l’ouverture d’une procédure collective.
  • Avoir souscrit pour le compte d’autrui et sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion eu égard à la situation de l’entreprise ou de la personne morale.
  • Avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers.
  • Avoir, en s’abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement.
  • Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.
  • Avoir déclaré sciemment, au nom d’un créancier, une créance supposée.

Avec quels effets et pour quelle durée ?

Les effets de la faillite personnelle sont doubles pour le dirigeant de la personne morale.

D’une part, celui-ci ne peut plus exercer aucunes fonctions de direction, de gestion ou de contrôle d’une personne morale, société autant qu’association. D’autre part, et tel que le prévoit l’article L. 653-10 du code de commerce, cette faillite peut entrainer la déchéance électorale, ou plus précisément, l’incapacité d’exercer une fonction publique élective.

Fort heureusement cette sanction n’est pas prononcée Ad Vitam Aeternam. Elle est effectivement limitée à une durée de quinze ans comme le préconise l’article L. 653-11 du code de commerce.

De plus, concernant l’impossibilité d’exercer une fonction publique élective, la durée de cette sanction est égale à celle prononcée pour la faillite personnelle, dans la limite de cinq années.

Vous l’aurez compris, cette sanction est le fruit de règles de droit qui commandent aux dirigeants de sociétés ou aux entrepreneurs personnels de ne pas confondre leurs intérêts personnels avec ceux de la personne morale.

 

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