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Accord entre Amazon et la Commission européenne : une aubaine pour les vendeurs utilisateurs de la plateforme 

Publié le 03/27/2023
minutes

L’entreprise Amazon est au cœur des préoccupations de la Commission européenne en matière de droit de la concurrence.

Rendue le 20 décembre 2022, la décision définitive de la Commission européenne met un terme à son enquête ouverte à l’égard du géant Amazon, soupçonné de pratiques anticoncurrentielles sur sa marketplace

Si la prise d’engagements contraignants évite à l’entreprise une condamnation, une action en responsabilité n’en demeure pas moins possible pour les vendeurs tiers, à charge pour ces derniers de démontrer que les pratiques objets de l’enquête constituent effectivement des pratiques anticoncurrentielles lui ayant causé un préjudice. 

I. Fin d’une enquête pour abus de position dominante

Depuis 2019, la Commission enquêtait sur l’utilisation des données récoltées par Amazon à partir de sa marketplace (i.e. place de marché en ligne). Celles-ci lui auraient permis d’ajuster ses propres offres au détail, faussant ainsi la concurrence avec les autres entreprises utilisatrices de sa plateforme. 

Par ailleurs, un second volet s’était ouvert en 2020 concernant le référencement favorisé des propres offres d’Amazon. L’égalité des conditions et critères de sélection des offres apparaissant dans la Buy box et le label Prime, profitant d’une visibilité accrue sur la plateforme, étaient en effet remis en cause par la Commission. 

Ainsi que le souligne cette dernière, il est essentiel de noter qu’Amazon dispose d’un « double rôle » de plateforme. Exploitant, d’une part, une place de marché en ligne permettant aux indépendants de vendre leurs produits, l’entreprise y propose, d’autre part, ses propres offres. La plateforme se retrouve ainsi en concurrence avec ses propres clients.

Or, suivant les conclusions préliminaires de la Commission, Amazon occupe une position dominante sur plusieurs marchés nationaux de fourniture de services de marketplace, notamment français, allemand et espagnol. Dès lors, une fois ce marché pertinent défini, la Commission conclut de manière préliminaire que l’entreprise abusait de sa position en favorisant artificiellement ses propres offres au détriment des vendeurs tiers et des consommateurs. 

L’article 102 du Traité de fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) réprime en effet les abus de position dominante, notamment en imposant des prix et conditions de vente inéquitables, ou des conditions inéquitables à des prestations équivalentes. 

Après discussion, la Commission européenne a finalement accepté les engagements proposés par Amazon, qu’elle considère suffisants pour répondre à ses préoccupations préliminaires telles que présentées ci-dessus. Selon l’article 9 du règlement n° 1/2003, la Commission peut en effet contraindre une entreprise à des engagements de nature à faire cesser l’infraction aux règles de concurrence dont elle est soupçonnée, en lieu et place d’une condamnation. 

En l’occurrence, la plateforme s’engage à ne plus utiliser les données non publiques des vendeurs pour leur faire concurrence, notamment aux fins de vente au détail. Aussi, l’entreprise s’engage à éliminer les « biais » de sélection des offres mises en avant. Leur exécution fera l’objet d’un examen indépendant.  

II. Possible action des vendeurs tiers

Tout d’abord, il est essentiel de noter que seuls les engagements pris par Amazon lui sont contraignantset qu’aucune infraction n’est juridiquement reconnue à sa charge

L’abus de position dominante, même s’il n’est pas sanctionné par les autorités de concurrence, peut également donner lieu à des actions privées sur le fondement de la responsabilité civile.

Afin de prétendre à une réparation, les vendeurs intéressés devront démontrer, en plus de leur propre préjudice, la violation des règles de concurrence en bonne et due forme. 

Pour ce faire, un régime spécial de l’action en responsabilité du fait de pratiques anticoncurrentielles est prévu aux articles L. 481-1 et suivants du Code de commerce. L’action se voit facilitée par un jeu de présomptions, à partir de la décision de la Commission.

Puisqu’une décision d’engagement n’établit pas la culpabilité de l’entreprise concernée, la Cour d’appel de Paris a justement rappelé que « si la décision d’engagements ne peut en général servir de seul fondement à la caractérisation d’un abus de position dominante, cette décision constituant dans la plupart des cas un simple commencement de preuve » et ajoute qu’« il ne peut être exclu qu’elle y trouve des éléments suffisants en soi à fonder la responsabilité de l’opérateur » (CA Paris, 12 sept. 2018, n° 18/04914, à propos du jugement du TGI de Paris, 22 févr. 2018, n° 15/09129). 

En d’autres termes, si la décision d’engagements n’établit pas per se la responsabilité de l’entreprise visée, son contenu peut apporter des éléments de nature à fonder la responsabilité de droit commun. Dans l’affaire visée ci-dessus, la décision de l’autorité de concurrence avait été assortie d’études économiques, de nature à établir l’abus de position dominante. 

S’agissant du préjudice indemnisable, il peut notamment résulter du gain manqué par la diminution du volume de vente, ou encore la perte de chance issue de la privation de débouchés commerciaux. 

Ainsi, les entreprises de vente au détail, utilisatrices de la plateforme, seraient susceptibles de rechercher la responsabilité d’Amazon du fait des pratiques anticoncurrentielles visées dans la décision du 20 décembre 2022, sous réserve de la démonstration des conditions précitées.  

Le Cabinet Bruzzo Dubucq accompagne ainsi toute entreprise utilisatrice d’Amazon susceptible d’avoir été lésée par ces pratiques et souhaitant agir contre la plateforme. 

Sources & Informations supplémentaires : 

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