Le projet de loi PACTE, actuellement examiné en commission spéciale, est la priorité du Gouvernement en cette rentrée 2018. Annoncé en octobre 2017 par le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire, et arrivé au mois de juin en Conseil des ministres, ce texte occasionnera pour sûr des changements pour les dirigeants et leurs entreprises.
Parmi eux, son objectif d’abord, est de « relever un défi majeur, celui de la croissance des entreprises, à tout phase de leur développement ». L’ampleur de la réforme envisagée est donc d’entrée affichée.
Pour atteindre cet objectif, deux axes de travail ont été identifiés :
- d’une part, aider les TPE et PME à grandir et,
- d’autre part, associé davantage les salariés à la marche des entreprises.
Selon le ministre de l’Economie et des Finances « nos entreprises sont trop petites, elles n’ont pas la taille critique pour s’internationaliser et exporter davantage ». En effet, les ETI et les PME, entreprises d’importance stratégique, sont celles qui génèrent le plus d’emplois.
A titre d’exemple, l’édition 2017 de l’étude de l’Insee, intitulée « Les entreprise en France » recense 5 800 ETI sur le territoire francophone contre 12 500 en Allemagne, 10 500 au Royaume-Uni et 8 000 en Italie.
Les différentes propositions faites, touchent notamment à favoriser les créations d’entreprises. Cela passe par l’instauration d’un guichet unique électronique qui constituerait l’interface entre les organismes actuellement destinataires des informations collectées par les centres de formalité des entreprises (CFE), et les entreprises. L’entrée en vigueur de cette nouvelle architecture sera toutefois repoussée au 1er janvier 2021 afin de permettre le plein déploiement du téléservice unique. En complément, le projet entend créer un registre dématérialisé des entreprises.
Au-delà, une rationalisation du régime des annonces légales est envisagée. Il s’agirait notamment d’ouvrir les possibilités de diffusion de l’information légale par des services de presse en ligne, qui continueraient d’être gérés par les organes de presse locaux.
Toujours dans cette même perspective d’allègement des contraintes, serait supprimée l’obligation d’ouvrir un compte bancaire dédié à l’activité professionnelle pour les micro-entrepreneurs réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 5 000 euros annuels. Sera en outre supprimée la nécessité pour un entrepreneur individuel de déposer une déclaration de cessation d’activité auprès d’un CFE.
Pour les sociétés, l’ambition est également de « repenser la place des entreprises dans la so ciété » par l’intermédiaire de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises (RSE). L’intérêt social est l’une des mesures phares du projet. Aujourd’hui le texte se borne à préciser que « toute société doit avoir un objet licite et être constituée dans l’intérêt commun des associés ». La distinction serait désormais faite entre l’intérêt commun qui serait l’agrégation des intérêts particuliers des associés, et l’intérêt social qui se définirait comme l’intérêt propre de la société en tenant compte aussi des cocontractants ou des salariés.
Dans cette même philosophie, il est prévu des mesures visant à stimuler l’actionnariat salarié dans les entreprises privées en particulier en assouplissant les modalités d’offres d’actions aux salariés dans les sociétés par actions simplifiées. La présence d’administrateurs représentant les salariés serait elle aussi, revue à la hausse.
Une fois l’entreprise créée, encore faut-il la développer. L’ambition est alors de rationaliser certains seuils tels ceux des effectifs mais aussi des commissaires aux comptes. L’ambition est ici d’instaurer « un environnement juridique plus simple et plus favorable à la croissance des entreprises en matière de seuils d’effectifs » (exposé des motifs projet de loi Pacte).
En complément, de nombreuses dispositions du projet ont vocation à faciliter l’accès des entreprises au financement. La première concerne le projet de créer un document d’information minimal pour les investisseurs pour les offres de titres non cotés inférieures à ce seuil. Une deuxième série de mesures relatives aux actions de préférence, dont le régime serait sécurisé et modernisé. Une troisième innovation potentielle consisterait à introduire dans notre droit le financement par offres de jetons, traduction française des « Initial Coin Offering ». Sont visées ici les levées de fonds au moyen de la technologie « blockchain ».
De nombreuses mesures fiscales ont également été amorcées afin que – schématiquement – l’argent des plus aisés soit investi dans les PME françaises. La suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune et la création d’un prélèvement forfaitaire unique de 30% ont permis aux plus riches de libérer un certain montant de capital qu’il leur faut désormais conseiller d’investir dans les PME. Tel sera l’enjeu du prochain projet de loi de finances pour 2019.
Ainsi, avec toutes ces mesures envisagées, les dirigeants auront à faire face à une entreprise « nouvelle », plus proche de ses salariés et de son intérêt social. Il s’agira d’une entreprise plus humaine, qui partage les fruits de son développement, mais également plus libre et plus concurrentielle sur le marché, exempte d’un millefeuille administratif parfois contraignant. Ce sera enfin une entreprise davantage liée à son temps, digitalisée et dématérialisée.