Indemnité compensatrice pour non-renouvellement
La chambre commerciale de la Cour de Cassation dans un arrêt du 21 Juin 2016, a jugé que lorsqu’un agent commercial refuse de renouveler un contrat conclu entre lui et une société, celui-ci bénéficie d’une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi puisque la Cour le considère comme n’étant pas à l’initiative de la cessation du contrat.
En l’espèce, la société Elsevier a conclu avec la société Sofradif plusieurs contrats d’agence commerciale à durée déterminée pour la distribution de ses publications médicales. Alors que les deux derniers contrats arrivaient à échéance au 31 décembre 2011, la société Elsevier a notifié à son cocontractant par lettres du 2 mai et 8 septembre 2011 son intention de ne pas renouveler les contrats dans le but de négocier un nouveau contrat avec la société Sofradif. Au cours des négociations entre les deux sociétés, celles-ci ne sont pas parvenus à un accord sur un éventuel nouveau contrat. Alors la société Elsevier a assigné son cocontractant en réparation de son préjudice causé par le non-renouvellement du contrat, tandis que la société Sofradif a formé une demande reconventionnelle pour voir la première payer une indemnité de cessation de contrat.
La Cour d’appel a dans un premier temps logiquement débouté de ses demandes la société Elsevier, qui invoquait un préjudice résultant du non-renouvellement abusif des contrats. Or la Cour d’Appel a également débouté la société Sofradif de ses demandes d’indemnités au motif que « celle-ci, qui a refusé de conclure le nouveau contrat proposé par la société Elsevier, ayant été à l’origine de la rupture de leurs relations, ne peut prétendre à cette indemnité ».
La société Sofradif se pourvoit en cassation afin de se voir reconnaitre son droit à une indemnité. Les juges la Cour de Cassation avaient donc à répondre à la question : « le fait pour un agent commercial de refuser le renouvèlement d’un contrat à durée déterminée l’empêche-t-il de prétendre à une indemnité de cessation de contrat ? »
La chambre commerciale casse et annule l’arrêt
La chambre commerciale a répondu par la négative en cassant et annulant l’arrêt d’appel en ce qu’elle a refusé d’accorder l’indemnité de cessation de contrat à l’agent commercial. Dans son attendu elle rappelle en se fondant sur les articles L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce que la Cour d’appel « en statuant ainsi, alors que l’agent commercial qui refuse de conclure un nouveau contrat à l’expiration du précédent n’a pas l’initiative de la cessation du contrat au sens du second texte susvisé, de sorte qu’il n’est pas privé du droit à indemnité prévu par le premier, a violé lesdits textes ».
En effet, selon l’article L 134-12, al. 1 du Code de Commerce, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi en cas de cessation de ses relations avec le mandant. Bien que celle-ci ne soit pas due lorsque la cessation du contrat résulte de l’initiative de l’agent, elle l’est lorsque cette rupture est justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial selon l’article L 134-13, 2 du Code de Commerce.
Par cet arrêt, la Cour de Cassation s’érige une nouvelle fois en grand défenseur de l’agent commercial dans les cas de cessation de contrat. Désormais, l’agent commercial a droit à l’indemnité en cas de non-renouvellement du contrat même si les négociations pour en conclure un nouveau ont échoué par son refus de signer puisque lors qu’on considère ce n’est pas lui qui est à l’initiative de la fin du contrat.
La portée de cet arrêt étend le droit de l’agent commercial de percevoir des indemnités de cessation de contrat à des conditions plus générales. La jurisprudence antérieure elle au travers la solution de la Cour d’Appel de Rennes qui par un arrêt du 9 avril 2013 avait subordonné dans un cas similaire le droit à indemnité de l’agent commercial à des propositions de renouvellement faites dans des « conditions abusives ».