La notion de restructuration
La notion de restructuration s’entend comme une réorganisation au sein de la société. La restructuration de société traduit en réalité un besoin de souplesse : en effet, selon la situation de la société, les objectifs des dirigeants, il peut être nécessaire de séparer des activités ou à l’inverse de les associer en raison de leur complémentarité. Cela s’explique par la mutation constante des sociétés qui ont besoin d’adapter leurs structures aux conditions d’exploitation en fonction de leur situation économique (pleine expansion ou difficultés).
Pour répondre à ces besoins, il existe différentes opérations juridiques dont la fusion, la scission et l’apport partiel d’actifs constituent les principaux instruments de la restructuration des sociétés. Pour ces opérations, le dirigeant de la société a un rôle particulier et des pouvoirs limités. Toutefois, la loi PACTE du 20 mai 2019 a élargi les pouvoirs des dirigeants dans les opérations de restructuration par l’instauration de mesures de délégation de compétences et de pouvoirs à leurs profits.
Le pouvoir limité du dirigeant dans les opérations de restructuration de sa société
Le dirigeant de société est en principe, investi des pouvoirs les plus étendus à l’égard des tiers. Il a tout pouvoir pour accomplir tout acte de gestion dans l’intérêt de la société. Il existe cependant plusieurs limites tenant à la loi, l’objet social, à l’intérêt social ou encore aux dispositions statuaires.
A cet égard, les opérations de fusion ou de scission, entrainant « la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires » et par conséquent, une modification des statuts des sociétés participantes (en raison d’une augmentation ou diminution du capital) sont des opérations qui relèvent de la compétence d’une décision extraordinaire et donc soumises à l’approbation des associés.
Le rôle actif du dirigeant dans la restructuration de sa société
Le dirigeant ne peut décider seul d’une opération de restructuration de sa société. Néanmoins, un certain nombre de formalités lui incombent parmi lesquelles figure l’établissement d’un projet de fusion ou de scission qui doit contenir un certain nombre de mentions obligatoires (forme, dénomination et siège social des sociétés participantes, motifs, buts et conditions de la fusion ou de la scission, rapport d’échange des droits sociaux…). Ce projet doit être signé par les représentants des sociétés participantes.
Par ailleurs, le dirigeant de société doit procéder à la rédaction d’un rapport de fusion ou de scission, qui doit être « adressé aux associés au moins quinze jours avant la date de l’assemblée et tenus, au siège social, à la disposition des associés qui peuvent en prendre connaissance ou copie ». Cette obligation varie toutefois en fonction des formes juridiques des sociétés participantes à l’opération. Ce rapport a pour objectif d’assurer aux associés comme aux tiers une certaine protection et information. C’est pourquoi, lorsqu’il est exigé, il doit ;
« expliquer et justifier le projet de manière détaillée, du point de vue juridique et économique, notamment en ce qui concerne le rapport d’échange des actions et les méthodes d’évaluation utilisées, qui doivent être concordantes pour les sociétés concernées ainsi que, le cas échéant, les difficultés particulières d’évaluation. ».
Il doit également mentionner en cas de scission, pour les sociétés bénéficiaires du transfert de patrimoine, l’établissement du rapport des commissaires aux apports.
Par conséquent, les dirigeants bien qu’à l’initiative des opérations de restructurations de leur société, ne peuvent décider de leur mise en œuvre. Cette compétence appartient aux assemblées générales des sociétés participantes. C’est ainsi que la Cour de cassation a pu préciser que sans l’approbation des assemblées générales, le protocole de fusion ne présentait pas de caractère contraignant, même si celui-ci a été signé par les dirigeants des sociétés participantes. Les dirigeants, disposent de pouvoirs limités mais d’un rôle important dans la phase de préparation de l’opération en raison des formalités qui sont à leurs charge (plus ou moins importantes en fonction de la forme juridique de la société) et dont le manquement peut entrainer la nullité de l’opération.
L’élargissement des pouvoirs de certains dirigeants dans les opérations de restructurations avec les mesures de la loi PACTE du 22 mai 2019
Le législateur, avec l’introduction de la loi du 22 mai 2019 dite loi PACTE, a facilité les opérations de restructurations en ce qu’il est désormais possible, pour les assemblées générales des sociétés participantes, de déléguer ses pouvoirs et/ou ses compétences aux dirigeants sociaux afin de mettre en œuvre une opération de restructuration. Cette délégation est envisageable pour les opérations de fusion, de scission mais également aux apports partiels d’actif. Toutefois, ces mesures ne semblent s’appliquer qu’aux sociétés anonymes : en effet, les textes prévoient que les bénéficiaires de la délégation sont, suivant le mode de direction choisi, le conseil d’administration ou le directoire.
Une délégation de pouvoirs
« L’assemblée générale extraordinaire de la société absorbante qui décide une fusion par absorption peut également déléguer le pouvoir au conseil d’administration ou au directoire, selon le cas, de déterminer les modalités définitives du projet de fusion, pour une durée qu’elle fixe et qui ne peut excéder cinq ans. ».
La délégation de pouvoirs permet donc au dirigeant de se voir confier par l’assemblée générale les pouvoirs nécessaires pour la fixation des modalités de l’opération de restructuration, cette dernière conservant son pouvoir de décision du principe de l’opération. Le dirigeant a un rôle actif dans l’opération de restructuration de sa société et peut être doté de prérogatives plus importantes dans la phase de réalisation de l’opération (pouvoirs en ce qui concerne la parité des changes, le montant de la prime de fusion…). Cette délégation de pouvoirs n’est toutefois que temporaire (valable que pour cinq ans).
Une délégation de compétences
L’assemblée générale peut aller plus loin et décider d’octroyer au dirigeant un pouvoir de décision sur le principe même de l’opération et de ses modalités. Il est effectivement prévu depuis la loi PACTE que « l’assemblée générale extraordinaire de la société absorbante peut déléguer sa compétence au conseil d’administration ou au directoire, selon le cas, pour décider d’une fusion par absorption pendant une durée qu’elle fixe et qui ne peut excéder vingt-six mois ».
Le maintien d’un pouvoir décisionnel pour les assemblées générales
Bien que les dirigeants sociaux puissent bénéficier d’une délégation de pouvoirs ou de compétence, les assemblées générales disposent toujours de prérogatives pour se prononcer sur l’approbation de l’opération envisagée. En effet, le dernier alinéa de l’article L.236-9 du Code de commerce prévoit qu’« un ou plusieurs actionnaires de la société absorbante réunissant au moins 5 % du capital social peuvent demander en justice, dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat, la désignation d’un mandataire aux fins de convoquer l’assemblée générale extraordinaire de la société absorbante pour qu’elle se prononce sur l’approbation de la fusion ou du projet de fusion. ». Cela permet aux actionnaires de maintenir leur faculté d’opposition sur l’opération mais aussi d’encadrer les pouvoirs des dirigeants sociaux pour de telles opérations qui ne sont pas sans conséquence pour les associés et actionnaires. C’est pourquoi, les délégations de pouvoirs et de compétences, bien qu’admises pour les sociétés anonymes depuis la loi PACTE, comportent des limites temporelles.
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