Il s’agit d’une problématique récurrente dans l’esprit d’un dirigeant d’entreprise : comment s’assurer une retraite convenable tout en assurant que l’entreprise dirigée perdure dans la sphère familiale ? En effet, il convient au dirigeant qui souhaite transmettre ses parts à son conjoint ou à ses enfants de diminuer les charges fiscales afférentes en optimisant ladite transmission.
A cet égard existe un montage, dit holding, qui permet de recouper les deux intérêts cités :
- D’une part, conserver l’entreprise dans la sphère familiale ;
- D’autre part, assurer au dirigeant un fond pécuniaire substantiel pour sa retraite.
En état de cause, le dirigeant peut également opter pour une donation dite Dutreil. Seulement, ce montage demeure très complexe à mettre en œuvre et cette option dépendra des nécessités économiques au dirigeant et du régime fiscal qu’il souhaitera suivre. Nous ne reviendrons manifestement pas sur celui-ci.
Afin de traiter au mieux cette problématique, nous nous intéresserons tout d’abord au principe du montage comparativement à la donation Dutreil (I) avant d’étudier le placement sur des contrats d’assurance-vie (II).
Une alternative à la donation Dutreil : la création d’une holding familiale
Ce montage comprend deux phases : la création d’une holding et le remboursement du prêt, d’une part, et le placement du produit de la vente des parts dans une assurance-vie, d’autre part.
Le LBO (« Leverage Buy Out ») est un montage financier permettant le rachat d’une entreprise dite cible au travers la constitution d’une société holding. La spécificité première de ce montage est que le rachat n’est pas assuré par la holding en tant que telle, mais par l’emprunt octroyé par un établissement de crédit.
En effet, la holding ne dispose pas d’un capital conséquent lors de sa constitution mais a le pouvoir de vivement négocier avec les établissements de crédit, la personnalité morale aidant. Seulement, ce montage n’est que peu usité en pratique dans la mesure où, pour qu’il soit pérenne, la société cible doit avoir une stabilité financière assurée. En outre, puisque la société holding fait reposer sur la société cible le remboursement de son emprunt, celle-ci doit avoir les fonds suffisants, sous peine de quoi elle ne pourra plus subvenir à celui-ci et entrera dans une situation de cessation des paiements.
De plus, le remboursement du prêt prend, en moyenne, entre cinq et dix ans.
Ajoutons que le montage LBO fonctionne selon trois effets de levier asynchrones :
- Un levier financier : la réussite du montage repose sur l’entreprise cible qui supporte le remboursement de l’emprunt. Il convient alors de bien choisir l’entreprise cible, suivant les deux critères suivants :
L’entreprise cible doit dégager un résultat suffisant ;
Le taux de retour sur investissement doit être positif, ce qui signifie plus simplement que son coût doit être inférieur à celui lié à l’endettement. - Un levier fiscal : la société holding pourra utiliser les mécanismes fiscaux suivants :
Les intérêts d’emprunt de la holding sont soumis à une déduction fiscale ;
Le régime fiscal « mère-fille » est applicable à partir du moment où la holding détient au minimum 5% du capital de l’entreprise cible. Ce régime permettra une exonération fiscale de l’ordre de 95% sur les dividendes versés par la filiale. - Un levier juridique : le montage permet de contrôler l’entreprise cible avec 51% du capital de la holding, soit 26% de l’entreprise cible. Une acquisition « normale » en aurait demandé le double.
Dès lors, et ceci lié au levier financier, seuls de très grands groupes se permettent de recourir à ce montage, avec des enjeux financiers généralement colossaux, d’autant que le montage a également subi de plein fouet la crise des subprimes de 2008, ayant alors entrainé une forte frilosité des établissements de crédit.
A ce titre, la dette contractée par la société holding est composée de deux strates :
- Une dette « sénior », représentant 50% (maximum) du financement ;
- Une dette « mezzanine », représentant la différence, avec des taux d’intérêts généralement très importants. Cette dette se voit néanmoins attribuer une priorité de remboursement.
A notre échelle, le montage semble cependant plus intéressant.
En effet, dans le cas d’espèce, l’entreprise cible n’est autre que celle dirigée par celui envisageant le montage holding. Aussi, il est assuré de la viabilité de la situation financière de l’entreprise cible, constituant généralement le principal frein au recours à ce type de montage.
Le principe est alors le suivant.
Le dirigeant crée une nouvelle société (holding), avec comme associés ses héritiers, ayant comme unique vocation que de transmettre le patrimoine professionnel. Une fois la société constituée, les parts du dirigeant sont données en nue-propriété aux enfants. La société holding ainsi constituée disposant d’un capital social faible, cette donation en nue-propriété n’est assujettie à aucun droit. Puisque le dirigeant est usufruitier, il conserve sa qualité d’associé et donc, a fortiori, sa capacité à prendre part à l’ensemble des décisions de la société holding.
Ensuite, la société holding emprunte auprès d’un établissement de crédit afin de racheter les parts de l’entreprise cible, société d’exploitation du dirigeant initial.
A cette occasion, le dirigeant dont les parts sont rachetées par la société holding perçoit le prix de vente desdites parts, assujetti à une fiscalité préférentielle (flat tax de 30%).
Dès lors, la société holding peut rembourser l’emprunt ainsi contracté grâce aux dividendes reçus par sa filiale. De plus, la société holding peut également facturer des prestations de services à la société d’exploitation via la constitution d’une convention de prestations de services entre la société holding et la filiale. Une fois l’emprunt remboursé, la holding continue évidemment de recevoir les dividendes de l’entreprise cible.
Enfin, les parts ne sont assujettis à aucun droit de transmission. En effet, lorsque le dirigeant meurt, les héritiers se voient reconstitués la pleine propriété des parts, l’usufruit prenant fin.
Le placement du produit de la vente sur des contrats d’assurance-vie : l’assurance d’une retraite confortable
La seconde phase consiste en ce que le produit issu de la vente soit placé par le dirigeant dans des contrats d’assurance-vie. Ce placement a deux intérêts :
- Permettre au dirigeant de transformer ses parts, non liquides, en espèces ;
- Diversifier son patrimoine en répartissant le risque :
Le placement permet également de bénéficier d’un cadre fiscal privilégié.
D’une part, seuls les intérêts compris dans les retraits sont fiscalisés, à hauteur de 1% à 2% du montant généralement retiré. En d’autres termes, le cadre est essentiellement exonéré, fiscalement parlant.
D’autre part, eu égard à la transmission des capitaux aux héritiers, avoir recours à des contrats d’assurance-vie est beaucoup plus intéressant, notamment lorsque ces contrats disposent d’une clause dite bénéficiaire, démembrée.
Insistons sur ce point.
La clause bénéficiaire est démembrée comme suit :
- L’usufruit est octroyé au conjoint ou à un enfant ;
- La nue-propriété est octroyée à un enfant ou à un petit enfant.
Ensuite, il s’agit de se référer à l’article 990 I, I°, al. 1 du Code général des impôts. Pour simplifier, un abattement automatique s’élevant à 152.500 € s’applique par bénéficiaire, tant que le versement est effectué avant 70 ans. Au-delà de cette somme, s’applique un prélèvement de l’ordre de 20% jusqu’à 700.000 €, puis de l’ordre de 31,25% sur la part excédant cette somme.
A titre de comparaison, au-delà de 902.839 € s’applique dans les successions en ligne directe classiques un prélèvement de 40%, puis de 45% pour les sommes dépassant 1.805.677 €. Notons que la clause bénéficiaire est d’autant plus utile en ligne indirecte, puisque dans un cadre classique, les prélèvements peuvent atteindre l’ordre de 60% (alors qu’ils sont plafonnés à 31,25% dans la transmission par assurance-vie).
Dans tous les cas, mieux vaut effectuer toutes ces opérations avant d’atteindre 70 ans. Il s’agit également de noter que ce montage assure une quasi-exonération des droits de mutation sur deux successions consécutives au maximum. Au-delà, la fiscalité retrouvera à s’appliquer comme indiqué précédemment, à moins qu’un nouveau montage soit mis en place, cela va sans dire.
Enfin, le recours à ce montage est conseillé une fois passée la cinquantaine.
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